Note d’analyse

Enseigner : une vocation à reconstruire, un équilibre à restaurer

À la rentrée 2024, 3 200 enseignants manquaient à l’appel dans les écoles, les collèges et les lycées du secteur public et privé. La crise d’attractivité que traverse le système éducatif diffère des précédentes tensions sur le recrutement. Alors que les crises du XXe siècle demeuraient ponctuelles, principalement liées aux fluctuations démographiques ou à l’élévation du niveau d’exigence pour entrer dans le métier, de nombreux indicateurs révèlent une distorsion devenue structurelle entre les besoins du service public d’éducation et sa capacité à les satisfaire. Les candidatures sont devenues insuffisantes pour couvrir les postes offerts aux concours. Par ailleurs, les départs volontaires en cours de carrière, longtemps marginaux, sont en forte augmentation tendancielle. La croissance, voire le seul renouvellement des effectifs, est depuis une décennie assurée par une augmentation continue du recours aux contractuels : entre 2015 et 2022, leur nombre a augmenté de 43 % dans le secteur public. On observe également les indices préoccupants d’une contraction à venir du vivier de recrutement, sous l’effet d’une perte d’attractivité des filières universitaires menant à l’enseignement, alors même que le vieillissement de la population enseignante va entraîner des départs massifs à la retraite. Derrière les difficultés croissantes à attirer et fidéliser des professeurs, c’est la question de la continuité, de la qualité et de l’équité du service public d’éducation qui est posée.

Publié le : 18/06/2025

Temps de lecture

4 minutes

Autrice

Johanna Barasz

Adjointe au directeur du département Société et Politiques sociales

Ces phénomènes ne doivent pas être interprétés comme un désamour généralisé pour l’enseignement. Comme le montre l’enquête qualitative réalisée dans cette étude, loin d’avoir perdu son sens ou sa noblesse, la mission éducative demeure fortement investie, tant par les aspirants au métier que par les enseignants, dont peu regrettent d’avoir choisi cette voie. Mais le déséquilibre entre l’exigence du métier, la reconnaissance accordée et les conditions concrètes d’exercice alimente un sentiment de déclassement et d’abandon délétère pour son attractivité. Seuls 7 % des enseignants en France – soit quatre fois moins qu'en moyenne dans l'OCDE – estiment leur profession valorisée dans la société. Rémunérations jugées insuffisantes, relations dégradées avec la hiérarchie, tensions avec les élèves et leurs parents : autant de facteurs qui participent au malaise professionnel et à la difficulté de « bien faire son travail » faute de moyens adaptés.

Le regard sur cette crise doit donc être à la fois nuancé et lucide. Si les indicateurs dessinent les contours d’une crise structurelle et durable, le tableau n’est pas uniformément noir : des différences subsistent selon les disciplines, les territoires, les secteurs, les profils… qui reflètent des aspirations pouvant devenir des leviers pour reconstruire l’attractivité du métier – un impératif pour tenir une promesse centrale du pacte républicain.

Les opinions exprimées dans ces documents engagent leurs auteurs 
et n'ont pas vocation à refléter la position du gouvernement.

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