Point de vue

La réglementation européenne sur les voitures neuves est plus pertinente que jamais !

Depuis des mois, l’industrie automobile européenne multiplie les critiques contre la réglementation sur les émissions des voitures neuves. Trop rigide, pas assez pragmatique : les reproches pleuvent, et oublient que les difficultés de la filière, en France en tout cas, précèdent largement la fixation de l’interdiction de vente de voitures thermiques neuves en 2035[1]. Pourtant, à y regarder de plus près, cette réglementation contient maintenant les bonnes incitations pour faire advenir les petites voitures électriques abordables que la présidente de la Commission européenne appelle de ses vœux ; et plus largement pour sortir le marché automobile européen de l’impasse dans laquelle il est engagé.

Publié le : 20/11/2025

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Ces dernières décennies, l’offre automobile neuve est montée en gamme : les voitures ont grossi et sont toujours plus équipées… Plutôt qu’exagérer la responsabilité des normes de sécurité, ou qu’accuser les voitures électriques pour une tendance qui leur préexiste, il faut prêter attention aux fondamentaux démographiques du parc automobile : il croît désormais moins vite et est composé de meilleures voitures qu’autrefois, plus simples d’usage au quotidien et plus capables de durer dans le temps. Les consommateurs arbitrent donc rationnellement en faisant durer les voitures existantes, tandis que l’offre neuve se replie sur un public de plus en plus étroit.

La voiture électrique peut aider à sortir de ce cercle vicieux, grâce à ses qualités objectives : coût d’usage très bas, haute fiabilité, durée de vie extrêmement longue – de quoi redonner à davantage d’acheteurs des raisons de revenir vers le neuf. Mais il faut pour cela que la descente en gamme de l’offre électrique, encore timide, s’accentue. C’est tout l’enjeu de l’initiative européenne pour des « E-cars » abordables annoncée en septembre par Ursula von der Leyen.

Quelques ajustements réglementaires pourront favoriser ces voitures abordables, comme exonérer les voitures à petite batterie des aides au maintien dans la voie et anti-endormissement. Mais ils n’apporteront pas à eux seuls l’incitation puissante nécessaire pour que ces voitures se vendent massivement, et deviennent donc vraiment abordables.

Or la réglementation existante, en forçant à une plus forte diffusion de l’électrique et en conférant depuis début 2025 un net avantage aux petites voitures, pousse précisément vers l’électrique abordable. Ce n’est pas un hasard si arrivent maintenant les ë-C3 et Panda, les futures iD.Polo et iD.1, la Twingo électrique, etc. Pour conforter ce mouvement, pousser au développement de voitures encore plus abordables et inciter à en vendre le plus possible, il est indispensable de ne surtout pas relâcher cette réglementation. C’est bien dans ce cadre, et à l’abri des protections commerciales aujourd’hui nécessaires, que pourra être opéré le rattrapage technologique sur l’industrie automobile chinoise – dont l’avance ne porte malheureusement pas que sur l’électrique. 

En revanche, la réglementation souffre du fait qu’elle fonctionne par hautes marches, une tous les cinq ans. Cela fait alterner années d’attentisme et années d’inquiétudes au moment de franchir les seuils – d’où les débats actuels. Il serait légitime et nécessaire, pour ne pas renouveler l’expérience en 2030 puis 2035, de lisser la trajectoire sur la période 2028-2035, voire de continuer à comptabiliser le respect des objectifs par moyennes glissantes sur trois ans, comme mis en place pour 2025-2027. Mais sans affaiblir la contrainte d’ensemble – que seul le regard d’experts indépendants pourra garantir.

Les équipes du HCSP remercient très chaleureusement Bernard Jullien, universitaire et consultant spécialiste du secteur automobile, ancien directeur du Gerpisa (Groupe d’études et de recherche permanent sur l’industrie et les salariés de l’automobile) et auteur de nombreux ouvrages, et Patrick Pélata, président de l’Académie des technologies et ancien directeur général délégué du groupe Renault, pour les multiples éclairages qu’ils ont apporté en amont de la rédaction du présent texte.

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[1] L’Insee calcule que la branche automobile française est passée de 193 400 emplois en 2005 à 118 200 en 2015, soit -39 % en dix ans. Voir aussi les calculs et projections effectués par Xerfi sur l’ensemble de la chaîne de valeur, pour le compte de « l’engagement de développement de l’emploi et des compétences » de la filière.

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Gérardin, M. (2025, novembre). La réglementation européenne sur les voitures neuves est plus pertinente que jamais ! (Point de vue). Haut-commissariat à la Stratégie et au Plan.
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Gérardin, Maxime. La réglementation européenne sur les voitures neuves est plus pertinente que jamais ! Point de vue, Haut-commissariat à la Stratégie et au Plan, nov. 2025.
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GÉRARDIN, Maxime, 2025. La réglementation européenne sur les voitures neuves est plus pertinente que jamais ! Point de vue. Haut-commissariat à la Stratégie et au Plan, novembre.

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